Hommage à Catherine Delcroix

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24 septembre 2014
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L'ensemble de la profession a rendu un hommage public à Catherine Delcroix lundi 22 septembre à Paris.
Décédée le 16 juillet 2014, Catherine était administratrice de l’Orchestre national d’Île-de-France, présidente du Syndicat National des Orchestres et des Théâtres Lyriques (SYNOLYR) et vice-Présidente de l'Association Française des Orchestres (AFO). Suit le texte de l'hommage rendu par le Président Ivan Renar au nom de l'ensemble des membres de l'AFO.
"Nous avons tous connu Catherine à différents titres, sous différentes facettes.
Dans cette salle, vous avez tous un mot à dire, un souvenir à rappeler, et parmi eux de nombreuses images heureuses. Je ne serai pas un porte parole, mais je veux témoigner de ce que Catherine nous laisse, de la richesse et de la générosité de son parcours.
Au sein de l’Association Française des Orchestres, nous avons tous été marqués par des qualités qui lui étaient propres, et qui ont donné à ses actions une signature spécifique.
Catherine était une et indivisible, comme la République ! C’est pourquoi il faut la prendre en bloc comme disait Clémenceau, parlant de la Révolution française de 1789.
Je pourrais parler de son caractère entier, qui a été l’un des instruments de sa réussite professionnelle.
Mais plus encore, je veux dire que son sens du collectif et son sens de l'intérêt général étaient exceptionnels ; l’unité, elle l’a défendue au sein du SYNOLYR, comme au sein de la FEPS : les orchestres, les acteurs du spectacle vivant et plus largement ceux de la culture, sont rassemblés et unis autour de préoccupations communes qui méritent que l’on se batte pour elles. Catherine a ainsi été un artisan convaincu de la création de l’intersyndicale SYNOLYR-CPDO.
Mais cette unité n’est pas synonyme d’uniformité, elle renvoie à la diversité qui est une richesse. Catherine a été ainsi un porte parole de la diversité démocratique, de celle dont l’expression permet de poursuivre sa route ensemble et de bâtir de grandes choses.
Dans un moment où « l’effondrement de la raison engendre des monstres », pour reprendre la formule de l’écrivain Georges Bernanos, Catherine avait compris que l’enjeu de la culture, et de la musique en particulier, était bien d’éclairer la richesse des hommes et des femmes. Et aussi que les arts, souvent décriés comme dispendieux et élitistes, faisaient au contraire naître une inestimable plus-value humaine.
Elle a toujours su que le non partage de l’art, c’est comme une bombe à fragmentation : ça fait des mutilations terribles, et aussi que reconnaitre le rôle irremplaçable de la culture reste un combat.
Le mot « désespoir » n’est pas politique et le mot respect n’a pas à connaitre « la pénurie ».
Catherine était un personnage fort et constant, plus qu’une battante, une combattante, une femme de conviction, guidée par les mêmes principes dans son action et dans ses relations professionnelles ou amicales. Elle admirait le travail, pour sa valeur intrinsèque, comme un devoir, comme une forme d’absolu, mais aussi comme un jeu. Elle maitrisait très bien une sorte de distanciation brechtienne.
Lui rendre hommage aujourd’hui, elle qui est l’honneur du service public de la musique, c’est notre manière de reconnaitre un legs, et de la remercier pour son action, et pour le souvenir qu’elle laisse, très fort, derrière elle. Elle, qui était de tous les combats.
La Grande Dame qu’elle a été nous rappellera en permanence que le temps de l’art, c’est la longue durée et que dans les renaissances, les artistes, les créateurs, jouent un rôle fondamental. Souvenons-nous de ce que disait un jour Pierre Boulez : « il n’y a aucune fatalité à l’histoire. L’histoire est ce que l’on y fait. L’histoire est une chose que l’on agit et non pas que l’on subit ».
Jusqu’à son dernier souffle, Catherine n’a jamais subi. Elle a combattu. Comme disait un poète de la Resistance, René Char : « c’est dans l’obscurité qu’il fait bon de croire à la lumière ».
C’est en cela que nous disons encore aujourd’hui aux membres de sa famille ici présents, que nous partageons leur peine, que nous les embrassons, tout en étant très fiers et heureux de l’avoir côtoyée."